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Palimpsestes ou âmes mortes ? La russification des marques européennes de grande consommation

Graham H. ROBERTS

Université Paris X Nanterre

Index matières

Mots-clés : publicité, marketing, consommation, Russie, nationalisme

Texte intégral

« wanderlust !
relentlessly craving wanderlust
peel off the layers
until you get to the core »
Björk, Wanderlust[1]

Уловив настроение важной клиентки, метрдотель провел прибывших в самый почетный кабинетик и усадил под стилизованный портрет Президента РФ, на котором глава Российского государства был изображен в виде богатыря на страшном косматом коне, держащим меч размером с доску из хорошего забора.
Olga Slavnikova, 2017[2]

La problématique principale de ce colloque est l’identité nationale de la Russie et la relation entre la Russie et l’Europe. Nous allons examiner cette problématique à travers les marques européennes de grande consommation implantées en Russie, et la façon dont celles-ci projettent une certaine idée de la Russie. Dans un premier temps, je m’appuierai sur le concept de palimpseste proposé par Gérard Genette, et je verrai en quoi cet outil conceptuel se prête à mon objet. Il faut dire qu’il s’agit d’un début de réflexion, et que je ne peux donc prétendre que mon argument soit parfaitement étanche.

Tout d’abord, une question s’impose : pourquoi aborder la question de l’identité nationale à travers les marques de grande consommation ? Afin de mieux répondre à cette question, je propose de faire un petit pas en arrière, et de me concentrer sur la manière dont les choses s’organisent autour de la marque. Car il faut dire que les marques – ce que Marie Bénilde appelle « ce bien immatériel »[3] – sont très fortement impliquées dans la problématique de l’identité. Comme l’a très bien souligné l’un des grands théoriciens français de la marque, Jean-Noël Kapferer, la marque aide le consommateur à s’y retrouver face à la multitude des différents produits, autrement dit à distinguer entre ces produits et à en identifier les meilleurs, certaines marques constituant un gage de qualité supérieur par rapport à d’autres[4]. Dans son ouvrage clé Le système des objets, écrit en 1968, Jean Baudrillard va plus loin que Kapferer. Selon Baudrillard, « la fonction de la marque » n’est pas seulement de « signaler le produit », mais également de « mobiliser les connotations affectives [du consommateur] »[5]. La marque, en effet, est pour Baudrillard « capable de résumer à la fois une diversité d’objets et une foule de significations »[6].

Pour l’entreprise, en revanche, la marque servirait à tirer profit de valeurs collectives – selon David Aaker et Jacques Lendrevie[7] –, en véhiculant, et renforçant, des mythes ou des clichés – d’après Jean-Marie Floch[8]. Dans leur ouvrage Persuasion in Advertising, O’Shaughnessy et O’Shaughnessy[9] insistent sur le fait que la raison d’être d’une marque se trouve souvent dans une notion, fût-elle spécieuse, d’une identité collective à laquelle elle ferait appel – on peut noter que leur propos trouve un écho direct dans le slogan de la marque Оtchakovo (Očakovo), fabricant de kvass et de bière – « Традиция, которая нас объединяет » (« Une tradition qui nous réunit »). Bernard Cathelat fait écho à O’Shaughnessy et O’Shaughnessy lorsqu’il rappelle que « acheter un produit est acheter une identité autant et plus sans doute qu’une utilité »[10]. Nous verrons plus tard qu’il s’agit là d’une stratégie déjà bien rodée par bon nombre de marques en Russie.

Voilà pour la marque. Qu’en est-il du terme « palimpseste » ? Le concept a été le plus élaboré par Genette, qui donne la définition suivante : « tout texte dérivé d’un texte antérieur, par transformation […] ou par […] imitation »[11]. Il faut dire que Genette applique ce terme exclusivement au champ littéraire. Cependant, nous partons du principe que son concept peut s’appliquer à d’autres pratiques textuelles, en dehors de la littérature stricto sensu. Car, selon l’expression de Algirdas Julien Greimas, « hors du texte, point de salut »[12]. Ainsi, entendons-nous par « palimpseste » tout système de représentation – de mots ou d’images – qui renvoie à un ensemble codifié plus ancien.

Pour illustrer notre propos, nous dirions qu’une sculpture comme L’amour brisé de la série Au bord de Gricha Brouskine – réalisée entre 2001 et 2003 – constitue un palimpseste dans la mesure où elle renvoie à un mode de représentation plus ancien – en l’occurrence soviétique – dont elle détourne le système sémiotique par le truchement de la transformation plutôt que de l’imitation.

Cette sculpture représente en effet un jeune homme et une jeune femme. Si ces deux personnages regardent dans la même direction, le jeune homme est debout sur un socle, alors que sa partenaire, elle, a déjà les pieds dans le vide. On a l’impression d’assister à la fin d’une étreinte. Effectivement, la main de l’homme est restée posée sur la hanche de la femme, et son bras à lui apparaît sectionné à la hauteur du coude. Les deux corps, dont des morceaux ont déjà commencé à se détacher, sont en outre légèrement désarticulés et réalisés dans un matériau par endroits craquelé. La statue de Brouskine renvoie d’une manière indiscutable et délibérée à une autre œuvre, référence incontournable du patrimoine artistique soviétique. Il s’agit du monument installé à l’entrée du Parc d’expositions des réalisations économiques à Moscou représentant un jeune prolétaire et une paysanne unissant leurs bras pour brandir ensemble un marteau et une faux[13].

En matière de publicité, on pourrait citer bon nombre d’affiches de la société Eurostar, dont la dernière met en scène une Alice arrivée tout droit du pays des merveilles, en train de faire cuire dans une marmite le fameux lapin blanc du récit de Lewis Carroll, accompagnée du slogan « Londres à prix méchant ». Ce point est crucial, car si un slogan ou spot publicitaire, ou même l’emballage d’un produit, constitue un système textuel, de ce fait il peut être un palimpseste. En effet, la notion élaborée par Genette est selon nous extrêmement pertinente pour quiconque cherche à examiner la façon dont certaines sociétés européennes implantées en Russie tentent de faire accepter leurs produits par le consommateur russe en les faisant passer pour des marques « locales » (otečestvennye), plutôt qu’étrangères.

À ce titre, force est de constater que depuis la chute de l’Union soviétique au début des années 1990, le consommateur russe a effectué un virage à 180 degrés quant à sa perception des vertus relatives des marques étrangères – et notamment européennes – et russes. Levi’s n’est plus la référence en termes de jeans, et si McDonald’s a eu le succès que l’on sait depuis l’ouverture de son premier restaurant en 1990, ceci est en grande partie dû à la « domestication » de la firme par les habitants de Moscou, de Saint-Pétersbourg et d’autres villes de l’ex-URSS[14].

Et pourtant, les premières années de l’époque postsoviétique ont ressemblé à celles de l’ère précédente, dans la mesure où les marques étrangères sont restées mieux prisées que leurs concurrentes russes. Fondée en 1992 par un groupe d’entrepreneurs russes dirigé par Mihaïl Doubinine, Wimm-Bill-Dann, société phare s’il en fut du secteur agroalimentaire russe, doit son nom à la célèbre banlieue de Londres. Se faisant passer auprès des consommateurs russes pour une marque européenne, cette société a réussi à se tailler la part du lion du marché national. De nos jours, en revanche, il y a fort à parier qu’aucune marque russe ne voudrait qu’on la prenne pour une marque d’importation. La situation s’est en effet complètement inversée depuis une dizaine d’années. La crise financière de 1998 y est pour beaucoup, car la dévaluation du rouble a changé la donne, incitant les Russes à se tourner vers les marques nationales. À cette époque, de nombreuses sociétés européennes, telles que Cadbury, Bonduelle, Renault ou IKEA, s’implantent en Russie afin de mieux servir le consommateur russe grâce à l’importante baisse du coût de fabrication qu’une telle implantation entraîne. D’autres leur emboîteront le pas en rachetant des entreprises russes à des prix particulièrement intéressants. Cette tendance concerne surtout – mais pas exclusivement – le secteur agroalimentaire, avec notamment des entreprises comme Unilever et Heineken, la belge InBev, l’anglo-danoise BBH, la norvégienne Orkla, la suisse Nestlé, la française Danone – qui a récemment racheté des actions de Wimm-Bill-Dann – ou encore l’italienne Parmalat – avec sa marque de lait La ville blanche (Belyj Gorod).

Pour reprendre la définition de « palimpseste », telle qu’elle est élaborée par Genette, légion sont les marques européennes dont la stratégie de communication repose sur l’imitation d’une iconographie prétendument « russe », et ceci essentiellement pour se faire passer pour d’authentiques marques locales. À titre d’exemple, on peut prendre la mayonnaise Calvé, une des innombrables marques du conglomérat anglo-hollandais Unilever. L’un des spots publicitaires pour cette marque en Russie reprend une figure mythique du folklore du pays, à savoir Snegourotchka, la petite-fille même de Ded Moroz – et l’héroïne entre autres d’une pièce de Nikolaï Ostrovski, d’un opéra de Rimski-Korsakov, d’un film de Pavel Kadotchnikov en 1968, et d’innombrables cartes de vœux russes. Ce spot n’a pas été pour rien dans l’élection – fort ironique – de Calvé en tant que « marque nationale » (narodnaâ marka) en 2006. L’exemple de Calvé conforte d’une manière particulièrement éloquente – à l’instar de l’exemple d’Eurostar, cité plus haut – la proposition de Bénilde, pour qui, « la publicité est par nature une industrie de la récupération culturelle »[15]. Dans le cas de la marque de mayonnaise d’Unilever, à l’instar de bon nombre d’autres marques, il s’agit moins de « folklore » – l’une des traductions possibles en langue anglaise de narodnaâ kul’tura –, que de « fake-lore »[16].

Si pour Roland Barthes, « la frite est le signe alimentaire de la “francité” »[17], la « russkost » serait quant à elle incarnée non pas par la mayonnaise – produit étranger comme son nom l’indique –, mais plutôt par le chocolat. On n’a qu’à étudier l’iconographie « vieille Russie campagnarde » caractérisant les emballages de la firme russe de confiserie, Krasnyj oktâbr’ (Octobre rouge). On y voit, par exemple, une petite fille portant un chaperon rouge qui cueille des fleurs dans la forêt (krasnaâ šapočka), un coq (petušok), un pavot rouge (krasnyj mak), ou encore un écureuil qui vient de ramasser un gland (Сказки Пушкина, Les Contes de Pouchkine). Encore plus parlant est l’exemple de Cadbury, qui a lancé il y a quelques années une gamme intitulée Zolotoj fond (Le fonds d’or) – appellation qui n’est pas sans rappeler la notion de Zolotoe kol’co (l’« Anneau d’or »), cet ensemble de vieilles villes russes situées aux alentours de Moscou. Cette gamme comprend la tablette Novgorod – la ville slave la plus ancienne de Russie, deuxième ville de la Russie kiévienne –, dont l’emballage porte l’image d’une église – il s’agit de l’église de Saint-Sauveur de Kovalëvo, construite à Novgorod en 1345.

Une autre tablette de la même gamme est nommée Rostov, avec cette fois-ci une image emblématique s’il en fut du kremlin de la vieille ville, construit au xviie siècle. À la différence des dessins de Krasnyj oktâbr’ qui marient naïveté et rusticité, Cadbury nous montre des images d’une Russie orthodoxe et militairement puissante. Les monuments que la société britannique choisit de faire figurer sur ses emballages impressionnent par leur solidité, leur durabilité, et surtout par leur « russité ». Absolument tout est « russifié » sur ces emballages, jusqu’au nom même de la marque, lequel est transcrit en caractères cyrilliques. En outre, même si dans le cas de Cadbury il s’agit de noms – et images – de villes russes, plutôt que d’allusions directes à la Russie, le succès commercial indéniable de la gamme Zolotoj fond nous rappelle les paroles de Hans Guldenberg, PDG de Nestlé Russie, qui a dit lors d’un entretien accordé à la revue russe Эксперт (L’expert) : « in Russia [the] country’s name arouses […] emotions that positively affects sales »[18].

Un autre grand confiseur, Sladko, fondé à Ekaterinbourg en avril 2001, va encore plus loin que Cadbury dans sa manière de représenter la vieille Russie, même si cette fois-ci il ne s’agit pas de la Rus’ de Kiev, mais plus précisément celle de la Russie des premiers Romanov. Depuis février 2005, cette entreprise appartient en effet à la très grande société agroalimentaire norvégienne Orkla, mais rien de ce qui figure sur les boîtes de sa gamme Vivat Rossiâ ne fait penser au pays des mille et un fjords. Cette gamme comprend deux variantes, une consacrée à Pierre le Grand, et l’autre à son épouse Catherine Ire. Sur chaque boîte l’on perçoit à la fois l’image idéalisée de la cathédrale de Notre-Dame de Kazan à Saint-Pétersbourg – « la ville de Pierre » – et un dessin dans le style d’un lubok de Ekaterinbourg – « la ville de Catherine » – telle que cette ville devait apparaître au début du xviiie siècle. Sur la boîte consacrée à Catherine, hormis le portrait de l’épouse de Pierre, on a droit à une petite leçon d’histoire sur Catherine, « la première impératrice russe » qui, nous dit-on, a sorti son mari le tsar d’un mauvais pas lors d’une bataille contre les Turcs, l’a épousé en 1712, était la mère de l’impératrice Elizaveta Petrovna, a donné son nom à la ville de Ekaterinbourg, et a régné toute seule après la mort de son époux, entre 1725 et 1727. Ce n’est pas par hasard que le nom de la maison mère – Orkla – ne figure nulle part sur ces boîtes – tout comme le logo de Nestlé, que l’on aurait du mal à trouver sur une bouteille de Perrier, même si cette marque « française » d’eau minérale, à l’instar de bien d’autres, appartient en fait à la société tentaculaire suisse. Ressemblant plus à des pièces de musée qu’à des contenants de denrées destinés aux rayons d’une grande surface, ces boîtes constituent de véritables palimpsestes dans le sens strict du terme genettien[19].

Si Orkla préfère l’époque des premiers Romanov pour bâtir une image de marque susceptible de séduire les consommateurs russes, d’autres marques européennes trouvent leur inspiration dans la Russie des tout derniers tsars. Tel est le cas de la bière Sibirskaâ korona (La couronne de Sibérie), par exemple. Malgré son appellation à forte dénotation – et connotation – russe, cette bière n’a rien d’une otechestvennaâ marka (« marque locale »). Car elle a été créée ex nihilo par le conglomérat belge InBev – par sa filiale SUN Interbrew –, suite à son rachat d’usines, et donc de moyens de production, en Russie. Entre mai et juillet 2006 on a présenté au téléspectateur russe toute une série de spots le replongeant dans une ambiance digne de la Russie de la fin du xixe siècle – les mauvaises langues diraient plutôt d’une mauvaise adaptation télévisuelle des romans de Boris Akounine, d’autant plus que la première chose que l’on voit est une machine à écrire, à l’aide de laquelle une main invisible tape le titre de la série, Genij rossijskogo syska (« Le génie de la police russe »). En effet, cet ensemble de spots fonctionne à l’instar d’un mini-feuilleton, mettant un « génial détective russe » aux prises avec un malfaiteur qui aurait braqué un carrosse transportant une importante somme d’argent appartenant à la trésorerie générale. Au début de ces spots, on nous présente cinq suspects, qui se trouvent tous à bord du train de nuit pour Paris. Chaque détail nous plonge dans une ambiance « âge d’argent » – hormis la machine à écrire antédiluvienne des premiers clichés –, il y a également le train à vapeur, la vieille orthographe sur les voitures de celui-ci – à un moment donné on a un gros plan sur le mot vagon’’, par exemple –, et l’intérieur des voitures elles-mêmes. À l’issue du septième et dernier spot, le héros – un brave détective russe – arrive à démasquer le malfaiteur qui n’est autre qu’un ingénieur… allemand[20].

À l’instar non seulement des romans à succès d’Akounine, mais aussi de toute une série de films apparus en Russie depuis la fin des années 1990[21], cette campagne publicitaire exploite le malaise identitaire dans la société russe actuelle, et nous exhorte à regarder vers un passé mythique, irréel. Elle vient par là même conforter l’hypothèse de Baudrillard, pour qui « lorsque le réel n’est plus ce qu’il était, la nostalgie prend tout son sens »[22]. D’ailleurs, ce que l’on a dans tous ces spots, ce n’est pas tellement l’imitation – pour reprendre le terme de Genette – mais plutôt l’imitation d’« une imitation », à savoir des aventures littéraires d’Eraste Fandorine.

Il s’agit, dès lors, non pas d’imitation proprement dite, mais de « simulation ». Le problème, comme le souligne si éloquemment Baudrillard, c’est que la simulation se pose en tant que barrière infranchissable entre le spectateur et le spectacle :

La simulation n’est plus celle d’un territoire, d’un être référentiel, d’une substance. Elle est la génération par les modèles d’un réel sans origine ni réalité : l’hyperréel.[23]

Toujours est-il que cette opération marketing a été couronnée de succès ; Sibirskaâ korona a obtenu la troisième place dans le concours national « Marque de l’année » en Russie en 2006. À en juger par l’impact extrêmement positif que cette campagne, et le concours qu’elle servait à promouvoir, ont eu sur les ventes de Sibirskaïa korona, Gilles Lipovetsky a tout à fait raison de noter que :

À la différence du marketing traditionnel qui mettait en valeur des arguments rationnels et la dimension fonctionnelle des produits, nombre de marques jouent maintenant la carte de la sensorialité et de l’affectif, des « racines » et de la nostalgie (le « rétromarketing »). D’autres mettent l’accent sur les mythes et le ludisme.[24]

La bière Sibirskaâ korona, elle, exploite à fois la nostalgie et le ludisme. InBev a tiré son épingle du jeu, nous l’avons vu, grâce à sa capacité de singer les marques locales, en l’occurrence russes. Bien loin le temps où les marques européennes de grande consommation, telles Mars ou Pepsi, se contentaient de doubler en russe exactement les mêmes spots que ceux qui avaient déjà fait leurs preuves en Europe occidentale ou en Amérique du Nord. Mais il faut dire que dans la publicité, comme dans n’importe quel autre domaine, certaines imitations sont plus recherchées que d’autres. Afin de donner un nouvel essor en Russie aux ventes de Rexona, une de ses plus grandes marques de déodorant, Unilever a fait appel récemment à une société londonienne de conseil en marketing, Greg Rowland Semiotics. Sur le site internet de cette société, on nous explique que lors de la création de cette campagne, « semiotic analysis explored the world of Russian femininity and other issues that were pertinent to the brand. By digging deep into the Russian national psyche we were able to create powerful new advertising concepts for Rexona »[25].

On a du mal à voir, pourtant, précisément quels éléments de la psyché féminine russe ont été mis à l’œuvre afin de créer les deux spots publicitaires de Rexona que l’on pouvait voir à la télévision russe au début de 2007. Dans le premier, qui cible les adolescentes – le déodorant s’appelle Rexona for teens, mention écrite « en anglais » sur chaque bombe –, on suit le parcours de quatre jeunes filles qui passent dans un train fantôme devant un mannequin représentant une méchante prof de maths, ensuite un père ringard – en chair et en os cette fois-ci – qui veut danser avec elles, et enfin un jeune garçon qui ressemble à un frère cadet particulièrement collant. À la fin du parcours, une voix-off féminine explique « nous savons ce qui vous fait suer, et nous savons comment résoudre ce problème ». Dans le deuxième spot, qui cible les consommatrices entre 25 et 35 ans, on nous montre comment une femme, à l’aide de son déodorant Rexona, arrive à attirer l’attention d’un jeune homme qu’elle veut séduire. Hormis le fait que ce spot ait été tourné dans le métro de Saint-Pétersbourg, on voit mal ce qui dans cette publicité relève de la « psyché nationale russe » dont se réclame l’agence Greg Rowland Semiotics.

N’empêche que l’image que Rexona nous montre est celle d’une Russie [hyper-]moderne. Je voudrais terminer mes propos sur la publicité imitative en parlant de deux marques qui exploite l’image d’une tout autre Russie, une Russie bucolique, innocente, intemporelle. Il s’agit d’une part d’ Uslada – société qui fabrique des produits laitiers et des jus de fruits, fondée en décembre 1997, et qui appartient actuellement à la firme allemande Ehrmann –, et d’autre part de Ohota – une bière de la hollandaise Heineken. Dans un de ses spots, Uslada met en scène deux femmes russes dans un endroit on ne peut plus typique de cette Russie, à savoir « les bains russes » (banâ). Comme on nous l’explique si bien sur le site advertology.ru, où on peut visionner cette séquence :

Типаж персонажей – это типичные представители целевой аудитории, простые жизнерадостные русские женщины, живущие полной жизнью и получающие удовольствие от простых типичных для русского человека ситуаций. Ситуация, описываемая в ролике – удовольствие от бани, красноречиво иллюстрирует приверженность русским традициям.[26]

Faire appel aux sentiments patriotiques chez le consommateur russe peut rapporter gros : grâce à cette publicité, les ventes des yaourts Uslada ont affiché une hausse de 30 %, et la notoriété de la marque a augmenté de plus de 7 1 %[27].

Pour ce qui est de la bière Оhota, il convient de faire une distinction entre dénotation et connotation. Dans un des spots TV les plus courants de cette marque la caméra nous montre une plateforme pétrolière dans une mer plus qu’houleuse, avant d’attirer notre attention plus particulièrement sur un câble en acier, lequel se casse. Une voix-off très mâle et gutturale nous évoque la difficulté de travailler dans de telles conditions météorologiques, avant de terminer sur une note positive : ce qui motive ce personnage, l’un des hommes qui travaillent sur la plateforme en question, c’est la foi en ce qu’il fait. Ce spot met en scène – dénote – une Russie moderne, industrialisée, postsoviétique. Ce qui est connoté, en revanche, c’est une Russie beaucoup plus ancienne, grâce au mot ohota (« la chasse ») lequel mot évoque une activité forcément rurale, et essentiellement présoviétique – on pense aux Zapiski oxotnika (Les Carnets d’un chasseur) de Tourguéniev, par exemple. En somme, ce spot fonctionne un peu comme la station de métro moscovite Охотный ряд, car il dénote – imite – la Russie soviétique et postsoviétique, mais connote – transforme – la Russie pré-soviétique. Il confirme par là même ce que dit Baudrillard : « la fonction de la marque […] est de mobiliser les connotations affectives »[28].

Nous avons beaucoup insisté jusqu’à présent sur le marketing imitatif. La deuxième catégorie de palimpseste dont parle Genette, nous l’avons déjà vu, est celle de la transformation. Un excellent exemple d’une marque qui fonctionne en transformant, plutôt qu’en imitant, une certaine image de la Russie est Coldrex, de GlaxoSmithKline. En effet, la marque se greffe sur une pratique traditionnelle de la vieille Russie rurale, à savoir le fait de boire de l’eau chaude avec du miel et du citron, afin de guérir le rhume et la grippe. Au début du spot, on nous présente le remède en question, dans un contexte vaguement rural. Après cette allusion directe à la vieille Russie, il y a un glissement visuel, et puis un certain éloignement ; l’on voit qu’une main invisible a posé un verre sur la table entre nous et le pot de miel, lequel est maintenant obscurci par l’eau chaude dont le verre est rempli. Au cours de ce spot, les repères visuels et textuels s’estompent, puis disparaissent. Cependant, il n’y a pas de rupture brutale, car on s’en va en douceur vers un monde meilleur, un buduščee qui, s’il n’est pas vraiment svetlee, et néanmoins nettement plus « chaud ».

La dernière marque que nous citerons ici est une véritable référence dans son secteur. Il s’agit de la marque Baltika, achetée récemment par la société belge InBev. Suite à ce rachat, Baltika a lancé une importante campagne publicitaire à la fin de l’année 2004. Cette campagne est composée de cinq spots dans lesquels le téléspectateur suit le progrès du transsibérien au fur et à mesure qu’il traverse la Russie depuis Vladivostok en direction de Saint-Pétersbourg. À la fin de chaque spot nous avons le même slogan – « Baltika – tam, gde Rossiâ » (« Une baltique, et vous voilà en Russie »). De par les vignettes qu’ils nous montrent, ces spots constituent un appel à la fois au patriotisme russe, et à la solidarité masculine. L’image de la Russie est celle d’un vaste pays unifié et fondamentalement rural ; dans un des spots, par exemple, il y a une rencontre assez amusante entre un businessman et des vendeuses de poissons desséchés sur le quai d’une gare. Ces publicités fonctionnent à la fois par « imitation » ludique de l’iconographie soviétique – les uniformes des employés de la société des chemins de fer dans un des spots, celui d’un marin dans un autre, sans parler de la musique de fond qui rappelle le côté kitsch d’un certain type de film soviétique. Cependant, il y a aussi « transformation ludique » d’un symbole paradigmatique de l’époque postsoviétique, à savoir l’homme d’affaires un brin guindé mais en fin de compte débrouillard, qui dès sa montée dans le train distribue sa carte de visite à tout le monde. Ces cinq spots illustrent très bien la théorie de Bernard Cathelat, pour qui « la publicité est la nouvelle incarnation de la culture populaire »[29].

Ce que véhicule la campagne publicitaire de Baltika n’est autre que l’idée d’une grande Russie, un pays doté de richesses naturelles inépuisables, où « vsë est’ », pour reprendre ce que dit l’un des personnages à un moment donné. La création d’une image de marque passe d’abord par la construction d’un mythe. Comme l’explique Jean-Marie Floch :

[Dans] la publicité mythique […] le produit [est] investi de sens et de valeur par l’histoire imaginée et par l’usage narratif qu’on en fait. Pour ce faire, il […] arrive [au produit] d’avoir recours à des légendes, des héros, des symboles (quasi-universels) qui sont déjà des rôles thématiques puissamment structurés, extrêmement connus et qui serviront de structure d’accueil au produit.[30]

En fin de compte, si une simple marque de bière constitue ce que l’on pourrait appeler « l’unité de surface » de cette publicité, c’est à l’espace russe dans son immensité que renvoie la signification sous-jacente. Ceci n’est pas sans rappeler une remarque de Jean Baudrillard qui, même si elle puise ses origines dans la France des années soixante, est néanmoins d’actualité en Russie et dans tous les pays émergents de l’Europe de l’est à l’aube du xxie siècle : « Les objets ont aujourd’hui moins d’importance que l’espace, et que le marquage social des espaces »[31].

À en juger d’après la pratique des entreprises européennes que nous avons citées tout au long de cette communication, le consommateur russe reste aussi patriote qu’auparavant, tout du moins en ce qui concerne les catégories de produits qui le touchent dans son quotidien – notamment les produits agroalimentaires et les produits de beauté ou d’hygiène personnelle. Qu’ils opèrent par imitation ou au contraire par transformation, les éléments de la communication – emballages, publicités et noms des produits – fonctionnent comme autant de « palimpsestes » reposant sur le mythe d’une Russie pré-soviétique, idyllique, et résolument non-européenne. On assiste en effet à la fétichisation, non pas de la « marchandise » – comme le dirait Marx –, mais de « l’âme russe » elle-même – autrement dit d’une « Tradiciâ, kotoraâ nas ob’’edinâet », pour reprendre le slogan de la marque Očakovo.

L’importance attachée par le consommateur russe à la « russité » d’un produit paraît incontestable. Et c’est précisément par la publicité que cette notion de « russité » se propage le plus souvent. Mais en fin de compte, il n’y a rien d’étonnant à ce que les outils du marketing servent à fabriquer le mythe de l’identité nationale – même si, dans le cas de la Russie, ces outils sont pour la plupart dans les mains d’étrangers[32]. Car comme nous le rappelle Bénilde, « la publicité vise […] l’adhésion à un ordre indissociablement économique et politique »[33]. Les documents iconographiques analysés ici sont des palimpsestes qui proclament le mythe d’une grande Russie idyllique, en conjuguant krepost’ (« forteresse ») et innocence, et en réconciliant la ville et la campagne. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’en imitant ou transformant – la distinction entre ces deux termes est fort contestable – un discours antérieur, ces « hypertextes » finissent par accentuer aux yeux du consommateur russe la distinction entre la Russie et l’Europe - l’altérité même de la Russie. Mais si ces marques sont des palimpsestes, l’ironie, c’est que la notion d’identité nationale sur laquelle elles reposent est, quant à elle, une « âme morte », précisément parce qu’aux yeux de l’annonceur – « européen » –, elle est gommée, et donc dénuée de sens, nonsense. Comme l’a si bien observé Baudrillard il y bientôt quarante ans, « ce langage [de la marque] est sans doute le plus pauvre qui soit : lourd de signification et vide de sens »[34].

Le drame, c’est que, comme le remarque Bénilde, « la tyrannie de la publicité implique […] l’adhésion à un état social mimétique, où il faut être autre pour être soi, où il n’est pas d’existence sans objets »[35]. Peut-être est-ce précisément parce qu’il n’y a plus de « soi » russe, qu’il n’y a plus dans ce pays que des « âmes mortes » dignes d’un roman de Gogol, que les marques européennes peuvent exploiter comme bon leur semble son patrimoine iconographique et culturel. Quoi qu’il en soit, si en Russie « la lutte des classes » n’est plus d’actualité, ce que Cathelat appelle « la lutte des marques et des produits » se fait, quant à elle, de plus en plus vive. Qui plus est, les marques que nous avons mentionnées ici confortent on ne peut mieux l’hypothèse de Cathelat, pour qui cette concurrence « n’est […] pas seulement un combat marchand, mais aussi, et par son intermédiaire, une guerre des visions du monde, une concurrence de valeurs, un choix de dominance culturelle »[36]. La guerre froide est peut-être finie ; la guerre des cultures, quant à elle, ne fait que commencer.

L’auteur remercie Marie Reygnier pour sa précieuse collaboration.

 

Notes

[1]  « envie intarissable de voyager !
toujours cette envie intarissable de voyager !
il faut enlever les couches superficielles une par une
avant d’arriver à l’essence. »

[2]  « Ayant capté l’humeur de sa cliente distinguée, le maître d’hôtel a fait passer les nouveaux venus dans la salle privée la plus illustre du restaurant et les a fait asseoir sous un portrait du Président de Russie, dans lequel le chef de l’État russe était représenté en guerrier mythique monté sur un terrifiant cheval à pelage abondant, brandissant une épée aussi énorme que la planche d’une immense palissade. »

[3]  Bénilde Marie, On achète bien les cerveaux : la publicité et les médias, Paris, Raisons d’Agir, 2007, p. 142.

[4]  Kapferer Jean-Noël, Les marques, capital de l’entreprise : créer et développer des marques fortes, Paris, Éditions de l’Organisation, 1998, 3e édition.

[5]  Baudrillard Jean, Le système des objets, Paris, Gallimard, 1968, p. 267.

[6]  Ibid., p. 268.

[7]  Aaker David et Lenrevie Jacques, Le management du capital-marque, Paris, Dalloz-Sirey, 1997.

[8]  Floch Jean-Marie, Sémiotique, marketing et communication : sous les signes, les stratégies, Paris, PUF, 2003, 4e édition.

[9]  O’shaughnessy John et O’shaughnessy Nicholas Jackson, Persuasion in Advertising, Londres - New York, Routledge, 2004.

[10]  Cathelat Bernard, Publicité et société, Paris, Payot & Rivages, 2001, p. 37.

[11]  Genette Gérard, Palimpsestes : la littérature au second degré, Paris, Seuil, 1982, p. 16.

[12]  Greimas Algirdas Julien, Sémantique structurale, Paris, Larousse, 1966, cité dans J.-M. Floch, op. cit., p. 3.

[13]  L’œuvre la plus célèbre de Gricha Brouskine, Lexique fondamental (1986) constitue un palimpseste à la fois textuel et visuel, car il contient des allusions à une célèbre citation de Lénine et au roman canonique du réalisme socialiste – Comment fut trempé l’acier d’Arkadi Ostrovski –, à côté d’images stylisées de l’époque soviétique (Kroupskaïa, Gagarine, un drapeau du Premier mai, etc.). Voir aussi le tableau Double autoportrait en jeunes pionniers, qui appartient à la série réalisée par Vitali Komar et Alexandre Melamide entre 1982 et 1983, et intitulée L’origine du réalisme socialiste (consultable sur le site [http://www.komarandmelamid.org] consulté le 15 septembre 2008). Sur l’art de Komar et Melamide, voir Groys Boris, Staline, œuvre d’art total, Nîmes, Jacqueline Chambon, 1990, p. 135-44. Groys qualifie l’art de Komar et Melamide de « post-utopique » : « [Dans leurs tableaux] ils permettent aux signes de différents systèmes sémiotiques de commuter librement, de se combiner, de s’ordonner afin de dévoiler si possible le réseau d’associations dans toutes ses directions et à tous ses niveaux » (p. 140-141).

[14]  Caldwell Melissa L., « Domesticating the french fry : McDonald’s and consumerism in Moscow », Journal of Consumer Culture, vol. 4, n° 1, 2004, p. 5-26.

[15]  Bénilde M., op. cit., p. 129.

[16]  L’auteur tient à remercier Marina Balina pour cette observation.

[17]  Barthes Roland, Mythologies, Paris, Seuil, 1957, p. 79.

[18]  « En Russie le nom du pays suscite […] des émotions qui ont un impact positif sur les ventes », [http://eng.expert.ru/business/32selling.htm] ; article en anglais, site consulté le 15 septembre 2006.

[19]  À cet égard, on pourrait citer une autre gamme de chocolats de Sladko, Bylina Nikitiča. Sur l’emballage de ces bonbons figurent le bouclier, le casque et le carquois du bogatyr’ (« preux ») Dobrynâ Nikitič, puissant et noble guerrier dont les exploits sont racontés dans une légende (bylina) appartenant au deuxième cycle de bylines, celles associées avec l’histoire de la Russie kiévienne.

[20]  L’association faite ici entre les Allemands, la prouesse technologique, l’esprit entrepreneur et l’argent, rappelle une thématique chère à certains écrivains russes du xixe siècle. On pense, par exemple, au personnage de Štol’c dans Oblomov de Gončarov, ou – dans une moindre mesure – à celui de Lopahin de La Cerisaie de Čehov.

[21]  À titre d’exemple on pourrait citer l’Arche Russe de Sokurov, Le Barbier de Sibérie de Mihalkov, ou alors Le Neuvième Bataillon de Bondarčuk. Cette vague de nostalgie de l’époque des tsars est le sujet de La journée d’un opričnik, roman de Vladimir Sorokine publié en 2006. À propos de ce roman, voir [http://www.liberation.fr/transversales/weekend/219247.FR.php], site consulté le 11 décembre 2006.

[22]  Baudrillard J., Simulacres et simulation, Paris, Galilée, 1981, p. 17. Sur l’exploitation de la nostalgie dans la publicité, voir aussi Williamson Judith, Decoding Advertisements : Ideology and Meaning in Advertising, Londres - New York, Marion Boyars, 1993.

[23]  Baudrillard J., Simulacres et simulation, op. cit., p. 10. À noter que le concept de « hyperréel » nous renvoie à celui de « hypertexte », lequel est pour Genette synonyme de « palimpseste ».

[24]  Lipovetsky G., Le bonheur paradoxal : essai sur la société d’hyperconsommation, Paris, Gallimard, 2006, p. 41-42. Les téléspectateurs étaient invités à répondre par SMS à une question portant sur ce qu’ils voyaient dans un des spots – il s’agissait d’identifier le numéro du wagon dans lequel voyageaient les suspects. Alors que le mode de consommation dans les pays occidentaux aurait mis plusieurs décennies à effectuer la transition dont parle Lipovetsky, la Russie, elle, n’aurait mis que quelques années.

[25]  « Une analyse sémiotique nous a permis d’explorer le monde de la féminité russe, ainsi que d’autres questions relatives à la marque. Creuser profondément dans la psyché nationale russe nous a permis de créer de nouveaux concepts publicitaires très forts pour Rexona. » (Nous soulignons) [http://www.semiotic.co.uk/rexona.html], site consulté le 9 avril 2007. À propos de la sémiotique de cette campagne, voir aussi [http://www.adme.ru/russia/2007/04/05/16674/], site consulté le 9 avril 2007.

[26]  « Le genre de personne représentée ici est typique de la cible. Il s’agit de femmes russes ordinaires, qui aiment la vie, qui s’épanouissent et qui s’amusent dans des situations simples et typiquement russes. La situation, décrite dans le spot – le banâ et ses plaisirs – montre on ne peut mieux l’adhésion [de la marque] aux traditions russes », [http://www.advertology.ru/print30632.htm], site consulté le 8 avril 2007.

[27]  [http://www.advertology.ru/print30632.htm], site consulté le 8 avril 2007.

[28]  Beaudrillard J., Le système des objets, op. cit., p. 267.

[29]  Cathelat B., op. cit., p. 72. Cathelat continue : « Le rôle des mass média [sic] est d’alimenter et de sauvegarder, à la fois, [un] noyau culturel ; et la publicité, comme eux, contribue à la défense d’une histoire, comme à la construction d’une utopie » (p. 96-97). Sur la question de l’identité nationale dans la publicité de Baltika, voir également Morris Jeremy, « The empire strikes back : projections of national identity in contemporary russian advertising », The Russian Review, 64, 2005, p. 642-660 et particulièrement p. 644.

[30]  Floch J.-M., op. cit., p. 203. Sur les aspects mythiques de la publicité d’autres marques russes de bière, comme Tinkoff, voir aussi Roberts Graham H., « La publicité dans la nouvelle Russie : vers une mythologie du désir », Chroniques slaves [numéro spécial intitulé Le texte dans la Russie contemporaine, actes du colloque de l’Université Stendhal Grenoble 3, mai 2006], 2, 2006, p. 85-94.

[31]  Baudrillard J., La société de consommation : ses mythes, ses structures, Paris, Denoël, 1970, p. 74.

[32]  Il en va de même pour les media en général. Voir Bourdieu Pierre, Sur la télévision, Paris, Raisons d’Agir, 1996.

[33]  Ibid., p. 32.

[34]  Baudrillard J., Le système des objets, op. cit., p. 268.

[35]  Bénilde M., op. cit., p. 142.

[36]  Ibid., p. 40.

 

Pour citer cet article

Graham H. Roberts, « Palimpsestes ou âmes mortes ? La russification des marques européennes de grande consommation », colloque La Russie et l’Europe : autres et semblables, Université Paris Sorbonne – Paris IV, 10-12 mai 2007 [en ligne], Lyon, ENS LSH, mis en ligne le 26 novembre 2008. URL : http://institut-est-ouest.ens-lsh.fr/spip.php?article129